Sunday, February 24, 2008

Étude sur La dialectique de la raison : La production industrielle de biens culturels. Raisons et mystification des masses

par Jean-François Duval, Jonathan Desjardins et Julien St-Yves

"Ce qui est nouveau ce n'est pas que l'art est une marchandise, mais qu'aujourd'hui, il se reconnaisse délibérément comme tel, et le fait qu'il renie sa propre autonomie en se rangeant fièrement parmi les biens de consommation confère son charme à cette nouveauté" (p.165-166). Ce passage traduit avec force éloquence le propos général de Adorno et Horkheimer dans La dialectique de la raison. Héritiers d'une grande tradition philosophique allemande, la dialectique, ils abordent ici la culture moderne comme étant l'enfant légitime de son époque, celui de l' "Aufklärung", et de son organisation sociale, le société industrielle capitaliste. Ils montrent que c'est naturellement que l'Art c'est adapté au modèle de la business. Que la production artistique c'est transformée pour se conformer aux processus de production de masse, se moulant aux phénomènes de l'organisation technologique et du marketing. Peu a peu, la valeur d'usage de l'oeuvre s'éfface derière la valeur d'échange. L'oeuvre d'art devient publicité, héraut de la consommation. Au bout de la chaîne de production, l'esthète n'est plus, il ne reste que le consommateur; Une coquille vide. La production de masse a finalement produit une masse d'individu identiques se caractérisant par leurs "[...] dents blanches, l'absence de taches de transpiration sous les bras et la non-émotivité. Et voice le résultat du triomphe de la publicité dans l'industrie culturelle : les consommateurs sont contraints à devenir eux-mêmes ce que sont les produits culturels, tout en sachant très bien à quoi s'en tenir" (p.176).

Selon Adorno et Horkheimer, il semble se produire un renversement dans le rapport de valeur qui définit l'oeuvre d'art sur le marché. Jusqu'à ce qu'elle soit "[...] si totalement soumise à la loi de l'échange qu'elle n'est même plus èchangée; elle se fond si aveuglément dans la consommation qu'elle n'est plus consommable. C'est pourquoi elle se fond avec la publicité [...]" (p.170). Il est claire qu'ils soulèvent là la pierre d'achoppement sur laquelle bute le "modèle classique" de la culture. Cette métamorphose, cette traversée du désert, est-elle la négation obligatoire et nécessaire au renversement dialectique du capitalisme? Et, l'artiste en est-il responsable, où était-ce inévitable?

réf : T.W. ADORNO et M. HORKHEIMER, La dialectique de la raison, Gallimard, coll. Tel, Paris, 1974, 281 p.

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